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Le manuel des différents types de jeûne en islam

Le manuel des différents types de jeûne en islam

Il existe en arabe deux termes pour désigner le « jeûne » : صيام (ṣiyām) et صوم (ṣawm). Le premier est cité à 8 reprises dans le texte coranique, le second est mentionné une seule fois, soit un total de 9 occurrences . Etymologiquement, ces deux synonymes  signifient « s’abstenir de faire quelque chose ».

D’un point de vue religieux, le ṣiyām consiste à ne pas boire, manger, fumer et avoir des relations sexuelles de l’aube jusqu’au coucher du soleil. Il convient de compléter cette définition, car en islam le concept du jeûne va au-delà de ces privations, il vise aussi les mauvais comportements : jeûner c’est aussi ne pas mentir, médire, être malhonnête, porter des regards concupiscents, etc. Si ces actes sont condamnés en temps normal, ils le sont d’avantage lors du ṣawm. Cet aspect est souvent négligé, voire oublié, bien que plusieurs hadiths (propos du Prophète de l’islam) y insistent :

« Celui qui ne délaisse pas le mensonge et les actes qui y vont avec, Dieu n’a pas besoin qu’il s’abstienne de boire et de manger. »

Précisions toutefois que ces mauvais agissements n’invalident pas le jeûne (contrairement au fait de boire, manger, etc.), ils diminuent cependant sa valeur et sa récompense.

Le jeûne occupe une place prépondérante dans la religion musulmane. Individuellement, c’est une pratique spirituellement enrichissante qui invite, entre autres, à la patience, à la maîtrise de soi et à la méditation. Collectivement, elle renforce les liens de solidarité : la faim et la soif qu’endure le jeûneur l’interpellent sur les difficultés qu’éprouvent, parfois quotidiennement, les personnes les plus démunies.

Généralement, on distingue deux grandes familles de ṣiyām : le jeûne obligatoire et le jeûne optionnel. La premier regroupe le jeûne du mois de Ramadan, le jeûne compensatoire et expiatoire. On peut représenter ces différentes catégories grâce à ce simple schéma qu’il convient de garder en tête pour ne pas perdre le fil des parties suivantes :

Catégories-jeûnes-islam

Le manuel des différents types de jeûne en islam

Le jeûne du mois de Ramadan est sans conteste la pratique la plus connue. Elle concerne tous les musulmans ayant atteint l’âge de la puberté. Plusieurs dérogations et dispenses sont cependant prévues pour les malades, les voyageurs, les femmes indisposées ou enceintes, etc. L’importance de cette pratique est telle qu’elle constitue l’un des cinq piliers de l’islam. Pour plus de détails, voir l’article Le Ramadan, mois du jeûne.

Pour ce qui est du jeûne compensatoire, deux cas de figure sont à citer :

  • Le premier concerne le jeûne du Ramadan : celui qui n’a pas pu observer le jeûne de ce mois pour une raison valable (par exemple la maladie) doit, quand sa situation le permet, compenser les jours perdus. La règle est simple : un jour à jeûner pour chaque jour manqué. Le cas d’une rupture du jeûne du Ramadan sans motif valable sera abordée dans la partie « jeûne expiatoire » :

« Quiconque d’entre vous, verra la nouvelle lune jeûnera le mois [de Ramadan] entier. Celui qui est malade ou celui qui voyage jeûnera ensuite le même nombre de jours. Dieu veut la facilité pour vous, il ne veut pas, pour vous, la contrainte. » (S.2-V.185)

  • Le second cas est relatif à l’offrande du pèlerinage : le sacrifice d’un animal (ovin, bovin, camélidé, etc.) est l’une des étapes du pèlerinage à la Mecque. Si, pour une raison ou une autre, le pèlerin n’est pas en mesure de faire cette offrande, il doit la compenser en jeûnant 10 jours (3 durant le pèlerinage et 7 ultérieurement) :

« Celui qui n’en trouvera pas les moyens [de l’offrande] la compensera par un jeûne de trois jours durant le pèlerinage et de sept lorsque vous serez de retour, soit, dix jours entiers. » (S.2-V.196)

La troisième catégorie de jeûne obligatoire est le jeûne expiatoire. Il sert, comme son nom l’indique, d’expiation (كفارة, kaffāra) à certains péchés. Les principaux cas sont :

  • Homicide involontaire : deux mois consécutifs sont à jeûner pour celui qui est responsable d’un homicide involontaire et qui ne peut affranchir un esclave et payer le prix du sang :

« […] le responsable de l’homicide remettra le prix du sang à la famille du défunt et il affranchira un esclave croyant. Celui qui n’en a pas les moyens jeûnera deux mois de suite en signe de repentir imposé par Dieu. » (S.4-V.92)

  • Rupture du jeûne du Ramadan sans motif valable : le fidèle qui n’a pas respecté ce pilier de l’islam sans raison valable (maladie, vieillesse, etc.) est tenu de jeûner deux mois consécutifs s’il n’est pas en mesure d’affranchir un esclave. S’il ne peut faire ni l’un ni l’autre, il doit offrir un repas à 60 nécessiteux.
  • Parjure : celui qui jure par Dieu et qui n’est pas fidèle à son serment doit expier sa faute avec au choix : affranchir un esclave, nourrir ou vêtir 10 nécessiteux. Si ce n’est pas possible, il doit jeûner 3 jours :

« Dieu ne vous sanctionnera pas pour les serments faits à la légère ; mais il vous sanctionnera pour les serments prononcés délibérément. L’expiation en sera de nourrir dix pauvres – de ce dont vous nourrissez normalement votre famille – ou de les vêtir, ou d’affranchir un esclave. Un jeûne de trois jours sera imposé à quiconque n’aura pas les moyens de s’acquitter autrement. » (S.5-V.89)

Le tableau ci-dessous résume ces différents cas. On l’aura compris, les expiations sont proposées par ordre de priorité, c’est-à-dire qu’on ne passe à l’acte expiatoire n+1 que si on ne peut accomplir l’acte n. Comme conséquence, le jeûne expiatoire ne devient réellement obligatoire que si l’acte qui le précède ne peut être effectué.

Exemples de fautes et leurs expiations
Faute à expier Option 1 Option 2 Option 3
Homicide involontaire Affranchir un esclave + payer le prix du sang Jeûner 2 mois consécutifs X
Rupture du jeûne du Ramadan sans motif valable Affranchir un esclave Jeûner 2 mois consécutifs Offrir un repas à 60 nécessiteux
Parjure Au choix : Affranchir un esclave, offrir un repas à 10 nécessiteux ou vêtir 10 nécessiteux Jeûner 3 jours X

Pour ce qui est de l’esclavage, l’islam est apparu à une époque où cette pratique était courante et bien enracinée dans les sociétés arabes (et bien d’autres : romaines, grecques, etc.). Pour y mettre fin, de nombreux passages coraniques et hadiths exhortent les musulmans à affranchir les esclaves. On le constate d’ailleurs sur tableau ci-dessus : rendre sa liberté à un homme est la première formule expiatoire proposée.

 

Le jeûne optionnel

qu’on nomme aussi jeûne surérogatoire. Il s’agit, pour ceux qui le souhaitent, de jeûner des jours supplémentaires de leur choix. C’est une pratique très méritoire et certains jours sont particulièrement recommandés. Par exemple (la liste n’est pas exhaustive) :

  • Six jours au choix du mois de Šawwāl (شوال‏), le 10e mois du calendrier musulman, autrement dit, celui qui suit le mois de Ramadan.
  • ʿAšūra (عاشوراء) : il s’agit du 10e jour du 1er mois du calendrier de l’islam. Il est aussi recommandé de jeûner le jour qui précède ʿAšūra ainsi que celui qui le suit.
  • Le jour de ʿArafa (يوم عرفة) pour ceux qui n’effectuent pas le pèlerinage à la Mecque.( lire aussi jour-de-arafat et aussi cet article merites-du-jour-de-arafa)
  • Trois jours de chaque mois, en particulier « les jours blancs » (الأيام البيض) c’est-à-dire les 13e, 14e et 15e jours de chaque mois.
  • Le lundi et le jeudi.

Si certains jours sont préconisés, d’autres sont déconseillés comme le vendredi tout seul, voire interdits comme les deux grandes fêtes de l’islam (l’Aïd al-Fitr et l’Aïd al-Adha). Par ailleurs, tout excès est proscrit. Ainsi le jeûne continuel, par exemple passer deux jours d’affilée sans boire ni manger, n’est pas autorisé. Au contraire, il est recommandé de rompre le ṣiyām dès le coucher du soleil et de prendre un repas, qu’on nomme suḥūr (سحور) juste avant l’aube pour garder ses forces.

Le jeûne durant toute l’année est lui aussi prohibé et le maximum autorisé est le jeûne alterné : un jour jeûné suivi d’un jour non jeûné.

Remarque : celui qui pratique un ṣiyām optionnel peut, en cas de changement d’avis, mettre un terme à son jeûne à tout moment. Bien entendu, la journée interrompue ne sera pas comptabilisée comme une journée entière.

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